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Traduction: Isabelle Buesser-Waser
La génération Z est constituée de toutes les personnes nées entre 1995 et 2010. Yannick Blättler s’intéresse depuis des années à ce qu’il faut faire pour attirer ce groupe cible. Les valeurs d’entreprise sont élémentaires dans le choix d’un employeur, une bonne relation au sein de l’équipe, l’épanouissement personnel ainsi que la recherche de sens. Selon une enquête de Neoviso, cette génération passe plusieurs heures par jour sur les réseaux sociaux – c’est là qu’il faut aller les chercher. Leurs principaux canaux : 96% utilisent YouTube et Instagram, 80% Snapchat, 59% TikTok. Et Facebook? Cette plateforme n’est pas pertinente pour cette génération.
Yannick Blättler, qui constitue cette génération Z?
Yannick Blättler: C’est une génération jeune, avide de découvertes, qui vit peut-être exactement les désirs et les rêves que leurs parents leur ont suggérés. Ces jeunes ont souvent grandi avec cette phrase: «Fais ce que ton cœur te dit.» Aujourd’hui, ils défient le monde du travail. C’est une génération intéressante.
Selon l’enquête Master 2022 de Neoviso, ces personnes passent entre trois et six heures par jour sur leur smartphone ...
Le smartphone est la télécommande de leur vie. Alors que les autres générations essaient de comprendre ce monde, la Gen Z le vit de manière intuitive. L’instantanéité, la flexibilité et la clarté de cet univers virtuel définissent leurs exigences pour tout le reste de leur vie. C’est pourquoi beaucoup de choses dans la vie réelle leur paraissent inefficaces, ennuyeuses ou trop lentes. Un facteur à ne pas sous-estimer – également pour le monde du travail.
De nombreuses entreprises cherchent des apprentis. Où aller chercher la génération Z?
Outre les portails de recherche d’emploi et la plate-forme pour les places d’apprentissage Yousty.ch, le site Internet de l’entreprise est un classique pour obtenir des informations sur le poste proposé. Mais il faut d’abord attirer la génération Z sur le site de l’établissement. On y parvient via les médias sociaux, en publiant régulièrement sur Instagram, Snapchat ou TikTok, ou encore en plaçant des annonces publicitaires ...
Et comment faire pour qu’ils postulent?
Les textes ne sont pas la priorité. Les photos, les vidéos et les thèmes multimédias sont plus importants. La Gen Z préfère regarder des contenus sous forme de vidéos (79%) et d’images (68%). Sans images animées, il est difficile d’atteindre la Gen Z. Une vidéo n’a pas besoin d’être professionnelle, le storytelling doit être adapté et l’authenticité est capitale. Elle doit venir des jeunes pour fonctionner pour les jeunes. Pour faire simple: postuler pour un emploi devrait apporter le même resssenti qu’une réservation sur Airbnb.
Quel est le rôle des parents et des amis dans ce processus?
Les parents sont très importants et interviennent fortement dans le choix du métier ou de la branche, mais rarement dans le choix de l’entreprise. Quant au cercle d’amis, il est crucial que ce dernier ait une forme de respect pour l’apprentissage choisi.
«Nous sommes tous des individus uniques avec nos propres besoins concernant la vie professionnelle. Pour la Gen Z, l’aspect humain prime sur l’aspect financier.» (photo: Daniel Winkler)
Comment créer de l’enthousiasme pour le secteur de la restauration spécifiquement auprès de la génération Z?
Il faut raconter des histoires sur ce qui se passe dans les coulisses de l’entreprise. Et pas sous la forme d’un livre de 125 pages sur la gastronomie (rires), mais avec des vidéos TikTok de 20 secondes. Beaucoup disent que les jeunes ne lisent pas les magazines. C’est faux, ils lisent. Leur magazine s’appelle Instagram!
Environ 30% des apprentissages dans la restauration sont interrompus. Comment pourrait-on y remédier?
Il y a quatre facteurs qui sont extrêmement importants: la reconnaissance, la flexibilité, des perspectives d’avenir et une gestion du personnel proche et transparente. Ce dernier point apporte également de la sécurité sur le plan psychologique, et implique d’aborder les problèmes. Il est essentiel d’évaluer si le rythme est assez rapide ou trop lent pour les apprentis. Au début de la première année d’apprentissage, beaucoup sont dépassés. Il faut alors ralentir le rythme, puis l’accélérer à nouveau.
47% des membres de la Gen Z se préoccupent de leur santé mentale, 28% de leur santé physique. Comment expliquer ces chiffres frappants?
Cela s’explique d’une part par la constante connectivité, et d’autre part, beaucoup s’inquiètent de la charge de travail. Il faut en parler. La résilience et le développement personnel sont de grands thèmes. Les jeunes ont aujourd’hui de très nombreuses possibilités, mais en parallèle, ils sont soumis à une forte pression de performance.
Comment les formateurs ou les supérieurs peuvent-ils y remédier?
En offrant une sécurité psychologique, en demandant de manière proactive comment cela se passe. Et en leur suggérant de se manifester si quelque chose ne va pas. On peut utiliser des outils comme le logiciel Moodtalk. Les collaborateurs y remplissent de courtes enquêtes dont on discute ensuite réellement. Les cadres sont aujourd’hui plus sollicités qu’auparavant, la conception de la hiérarchie a évolué et tend vers le soutien émotionnel et le coaching.
N’avons-nous pas tous beaucoup à apprendre de la génération Z afin de reconsidérer les structures sclérosées?
On peut apprendre l’un de l’autre, «Closing the gap between generations» est la mission de notre entreprise. Je souhaite que les seniors soient ouverts à la nouveauté. Il serait par exemple intéressant de confier la gestion d’un restaurant à de jeunes collaborateurs et de ne donner que les grandes lignes. La branche manque souvent d’innovation, que ce soit pour attirer plus de clients ou recruter.
Les boomers partent progressivement à la retraite, et avec eux jusqu’à 20% de la force de travail. A quoi ressemblera le monde du travail à l’avenir?
La Gen Z apporte plus de plaisir dans le monde professionnel. Elle travaillera probablement moins. Non pas parce qu’elle est paresseuse, mais parce qu’elle peut se le permettre. Au final, chaque employeur doit réfléchir à la manière de rester attractif.
Source: Neoviso, Kriens
