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Cuisinier d’Or: une victoire en guise de cadeau de départ

Caroline Goldschmid – 16 juin 2021
Le Français Paul Cabayé a remporté le concours du Cuisinier d’Or, le 31 mai dernier. Alors chef de partie viande au Restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier, le vainqueur est ravi d’avoir pu rendre ainsi hommage à Franck Giovannini, qui a été son chef durant quatre ans et qui est aussi le Président du Jury du concours. Organisée par Kadi, cette édition s’est déroulée dans des conditions particulières, covid oblige. Paul Cabayé nous raconte comment il a vécu ce concours et nous parle du nouveau défi qu’il s’apprête à relever, au Luxembourg.

- A cause de la pandémie, la demi-finale ainsi que la finale n’ont pas pu avoir lieu face à un public nombreux dans des conditions normales, mais elles ont été diffusées en live stream et sur les réseaux sociaux. Qu’est-ce que cela a changé pour vous durant le concours?
- En termes de cuisine, pas grand-chose: même s’il y avait plus de monde autour de moi à cause des caméras, je supporte bien le stress et j’étais dans ma bulle. En revanche, sans public, il y a moins de ferveur et c’est dommage. J’étais venu encourager un collègue lors d’une édition précédente et je dois dire que l’ambiance était toute autre. C’est quand même chouette d’avoir un public qui nous encourage...

- Avez-vous été curieux de voir ce qu’il se passait sur les réseaux?
- Carrément! Après les concours, bien sûr. Il y a eu un bel engouement et ça fait chaud au cœur de voir tous ces messages de soutien. On crée un autre type de lien avec le public, c’est le lien à la mode si j’ose dire. Moi qui suis fan de foot, je sais qu’on appelle souvent le public le 12e homme, car quand on est sur le terrain, les applaudissements des gens présents dans les gradins nous motivent beaucoup plus et nous poussent à tout donner. En cela, les messages sur les réseaux ont eu un peu le même effet.

- Comment s’est passée la finale: avez-vous rencontré des difficultés imprévues?
- Il y a toujours des choses qui ne se passent pas comme on le souhaite lors d’un concours de cuisine. Par exemple, à l’envoi du poisson, j’avais mis des tuiles au four et concentré sur le poisson, je les avais oubliées. J’ai eu de la chance, car elles n’étaient juste pas trop cuites. Mais quand on aime la rigueur, ce genre de choses est frustrant. Sinon, dans l’ensemble, il n’y a pas eu d’incident grave.

- En effet puisque vous avez gagné! Qu’est-ce qui a fait la différence par rapport aux trois autres finalistes?
- Selon moi, tout se joue au niveau des goûts. Grâce à ce que Franck Giovannini nous apprend, on finit par maîtriser les assaisonnements pour que cela puisse toucher l’ensemble du jury.

- Cette victoire a-t-elle un goût particulier lorsque le Président du jury est aussi votre patron?
- Totalement. Gagner le Cuisinier d’Or est une reconnaissance envers le restaurant et envers le chef Franck Giovannini. Durant mes quatre années à Crissier, il m’a fait évoluer et grandir. C’est une grande fierté pour moi et c’est une manière de le remercier pour tout ce qu’il m’a appris. Car si j’en suis arrivé là, c’est aussi grâce à lui. Dès que j’ai reçu le prix, je suis de suite allé le voir pour le remercier.

- Est-ce que vous diriez que la fermeture des restaurants était aussi une aubaine pour vous, car cela vous a laissé beaucoup de temps libre pour vous préparer au concours?
- C’est vrai que cela s’est avéré un avantage. En plus, le chef m’avait autorisé à utiliser les cuisines autant que nécessaire pour la préparation au concours. On a de la chance, car à Crissier, on est vraiment accompagné dans toutes nos démarches. Grâce à la pandémie, j’ai eu bien plus de temps pour m’exercer et surtout sans être fatigué, car en temps normal, lorsqu’on effectue cinq jours de travail et qu’on doit préparer un concours dans ses heures de libre, on finit sur les rotules. J’ai commencé à m’entraîner début mars. J’estime que si on s’entraîne trop, on ne prend plus de plaisir le jour J et ce n’est pas le but.

- Actuellement responsable de l’Académie de Cuisine à Crissier, Elodie Manesse a remporté le Cuisinier d’Or en 2017. Vu qu’elle a vécu le concours de l’intérieur, avez-vous bénéficié de ses conseils?
- En termes culinaires, je pars du principe qu’il ne faut être coaché que par une personne et pour moi cela a été le chef. Mais tout conseil est bon à prendre et certains d’entre eux m’ont été bien utiles, notamment en ce qui concerne l’organisation du concours ou le côté logistique. Par exemple, je ne savais pas qu’on allait utiliser des feuilles de couleur qui se fixent sur la planche à découper. Ce genre de choses peut faire la différence le jour du concours.

- Quelles retombées espérez-vous suite à cette victoire?
- Je n’attendais rien en particulier. Mais il est clair que les retombées médiatiques sont très importantes pour la carrière d’un chef: cela peut nous faire avancer beaucoup plus vite.

- Est-ce que cela vous a donné envie de prendre part à d’autres concours?
- Il y en a plusieurs! Je vais d’abord laisser passer un peu de temps, car je viens d’enchaîner deux concours (n.d.l.r: Paul Cabayé a également remporté le Challenge culinaire du Président de la République, en 2019). A terme, j’aimerais bien tenter ma chance au Taittinger et au Bocuse d’Or.

- Vous avez quitté le restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier le 12 juin, après pile quatre ans. Parlez-nous de votre prochain défi…
- Ce départ n’était pas prévu, car j’étais très heureux à Crissier. Il se trouve qu’on est venu me proposer un poste de chef au Luxembourg, où j’avais déjà travaillé. Le restaurant s’appelle Les Jardins d’Anaïs et la réouverture est prévue pour début juillet. Il a une étoile Michelin et le but est de la récupérer au plus vite. C’est un beau défi! Et comme je savais déjà avant le concours du Cuisinier d’Or que j’allais quitter Crissier, j’étais très ému lors de ma victoire. C’est mon cadeau de départ et un bel hommage au chef Giovannini.

- Devenir le chef d’un restaurant à 28 ans, c’est un bel exploit!
- Certains diront que 28 ans, c’est jeune, mais aujourd’hui je suis prêt à relever ce défi. Je me sens serein et confiant. Il faut dire que j’ai toujours été ambitieux et je pense que c’est le bon moment de me lancer. Sans oublier que Crisser est l’une des meilleures écoles: nombre de chefs étoilés sont passés par là. C’est une magnifique maison!