Se préparer un cocktail digne de ce nom à la maison nécessite plusieurs bouteilles de spiritueux, des agrumes, des herbes fraîches et du matériel tel qu’un shaker ou un blender. Aussi, une infusion comme celle au romarin doit être réalisée trois jours à l’avance. Enfin, pour soigner la présentation, des «garnish» sont nécessaires, tout comme un déshydrateur. Et s’il suffisait d’ouvrir une bouteille et de mettre des glaçons dans un verre avant de pouvoir déguster un cocktail mixé par un professionnel? Cette brillante idée – qui tombe à point nommé alors que la fermeture des établissements se prolonge – a été concrétisée par les associés-gérants du bar Le Vestibule, à Lausanne. Randy Schaller, Olivier Sutter et Andres Lizano ont créé la marque «Elixir de Joie».
Concrètement, il s’agit de cocktails entièrement faits maison, sirops et infusions compris, livrables dans toute la Suisse depuis début février. «Basil Rosemary», «Espresso Martini Fertig», «Cartel du Coing», «Doctor’s Old Fashioned»... Les amateurs de classiques revisités ont le choix entre deux tailles de flacons (250 ou 500 ml) qu’ils recevront chez eux le lendemain si la commande est passée avant midi. Sont inclus agrumes déshydratés et une notice où figure un QR code renvoyant vers une vidéo explicative. Inspirées des élixirs d’antan, les bouteilles ont été pensées de manière écologique: le verre est brun et la fabrication est locale (St-Prex). A défaut de la recycler, la fiole peut être réutilisée de différentes manières, en guise de vase ou de récipient à savon, par exemple.
Plusieurs paramètres ont été étudiés afin que la qualité et le goût restent optimaux durant un certain temps après la mise en bouteille. «Il fallait s’assurer que le cocktail survive jusqu’à 72 heures dans un carton sans que cela ne détériore le produit, même à des températures plus élevées», explique Randy Schaller. Des analyses en laboratoire ont montré que les mélanges restent stables jusqu’à un mois.
Aussi en take away
Avant de lancer le webshop, les trois amis trentenaires se sont mis à proposer leurs cocktails à l’emporter, en novembre dernier. «En octobre, nous avions senti la deuxième fermeture arriver et nous voulions être prêts pour proposer des cocktails en take away au moment du confinement», poursuit Randy Schaller. Encore aujourd’hui, les clients peuvent commander leurs boissons à l’avance s’ils le souhaitent et venir les chercher au bar Le Vestibule. «L’idée était de garder contact avec les clients, tout en couvrant une partie des charges fixes, et le succès a dépassé nos attentes puisque cela a permis de couvrir toutes nos charges fixes en novembre et décembre», se réjouit l’entrepreneur. La carte des cocktails disponibles en take away est plus étoffée, étant donné que les mélanges sont faits à la minute et ne voyagent pas par la poste.
Charges fixes couvertes
Durant les trois premières semaines d’activité, le site a enregistré une cinquantaine de commandes. «En février, nous avons atteint notre objectif et les ventes via le webshop ont couvert l’investissement. Nous sommes confiants que nous rentabiliserons la chose dès ce mois. Reste à savoir comment notre offre fonctionnera une fois la réouverture autorisée», souffle Randy Schaller.
Entre le webshop et la vente à l’emporter, toutes les charges fixes sont couvertes. «Bien sûr, on préférerait être ouverts! Heureusement, nous touchons les APG et avons reçu l’aide pour cas de rigueur.» Le bar Le Vestibule a ouvert le 25 février 2020 et a perdu 56% de son chiffre d’affaires à cause des fermetures. Randy Schaller ne regrette aucunement d’avoir tout quitté pour ouvrir un bar: ses élixirs mettent en joie en attendant que l’horizon ne s’éclaircisse.