Durabilité et luxe, une alliance qui fonctionne

Isabelle Buesser-Waser – 04 juillet 2022
L’Hôtel Royal, de l’autre côté du lac Léman, à Evian, s’inscrit dans une démarche durable globale, de la production au ­retour à la terre, en passant par les assiettes du restaurant étoilé Les Fresques. Reportage.

Au premier abord, le parc de 19 hectares de l’Hôtel Royal semble assez similaire à ceux que l’on peut trouver dans des établissements cinq étoiles. Mais au détour d’un chemin, on découvre tout à coup une prairie, parsemée de fleurs sauvages, avec çà et là, des tas de bois. Lorsqu’on arrête de parler, on entend le chant des oiseaux, que l’on distingue furtivement. Les bergeronnettes, rouges-gorges et merles se délectent des insectes nichés dans le bois laissé là pour leur servir de refuge. C’est un coin de nature simple et paisible, un plaisir pour les yeux et l’âme, et c’est surtout indispensable pour préserver la biodiversité. Romain Muraro, l’un des jardiniers du parc, raconte avec fierté: «Grâce à ces zones, de nombreux oiseaux sont revenus et nous sommes devenus un refuge de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). De plus, le parc est entièrement bio, aucun engrais chimique n’est utilisé et sur les zones qui sont tondues, les herbes coupées sont laissées sur place comme engrais naturel.»

La permaculture comme inspiration
Du côté du potager, la majorité des plants sont cultivés avec des techniques inspirées par la permaculture. D’un côté les baies, de l’autre les légumes et les herbes aromatiques. Le tout agencé de manière bucolique, permettant aux clients de découvrir comment pousse ce qu’ils retrouveront dans leur assiette le soir. «Le potager a une double fonction: il permet de produire des aliments pour nos restaurants et il sert aussi d’outil pédagogique pour nos clients et leurs enfants», indique Romain Muraro.
Un peu plus loin se trouvent quelques arbres fruitiers et, en aval, de plus grandes cultures et des ruches qui donnent un miel de fleurs particulièrement savoureux grâce aux prés fleuris.

Synergie entre cuisine et jardin
Le chef Patrice Vander se rend régulièrement au potager à l’heure du petit- déjeuner. C’est à ce moment qu’il choisit les fruits, les légumes et les herbes qu’il utilisera dans ses plats. La proportion d’aliments produits sur place dans les assiettes dépend des saisons et des conditions météorologiques. «Après le confinement, nous avions de bonnes réserves, et cet été, je pense que 90% de mes garnitures viendront du jardin grâce à un printemps particulièrement radieux. Quant aux herbes aromatiques, c’est du 100%!», raconte-t-il. Mais le chef Vander n’est pas le seul à puiser dans le potager. Pour la confection des cocktails, Davide Trupia y trouve aussi beaucoup d’inspiration.
Dans les cuisines, le souci de la durabilité ne s’arrête pas aux produits qui sont issus du jardin ou de producteurs locaux. Le chef s’efforce également de réduire au maximum le plastique et les déchets végétaux sont transformés sur place en substrat qui est ensuite rendu au jardinier comme engrais pour le parc. «En 2021, l’hôtel a pu traiter sept tonnes de déchets végétaux en sept mois grâce à ce système!», précise Patrice Vander.

Récupération de l’eau de pluie
Outre les prés fleuris et le potager, le parc est aussi composé de zones de gazon, d’une roseraie et d’un jardin zen. Tout cela nécessite parfois d’être arrosé. Afin d’éviter un arrosage trop fréquent, les rhododendrons ont été remplacés par d’autres plantes qui nécessitent moins d’eau et des questionnements sur la taille du gazon sont en cours, mais pas seulement. L’hôtel a investi dans des bassins de rétention pour récupérer l’eau de pluie et l’arrosage est géré par informatique avec un système d’hydrométrie qui permet de détecter si la terre est suffisamment humide.