Le monde de la nuit sous la loupe

Isabelle Buesser-Waser – 21 septembre 2022
L'avenir des clubs et les problématiques liées au monde de la nuit étaient au centre du Forum La Belle Nuit, le 12 septembre dernier. Cette rencontre destinée aux professionnels dans le cadre du Festival du même nom était l'occasion d'échanger autour des défis actuels de l'univers de la fête.

Après un weekend festif et ouvert à tous les publics, la dernière journée du Festival La Belle Nuit, dont l'objectif est de mettre en avant les valeurs de la charte La Belle Nuit et de réunir les actrices et acteurs du monde de la fête lausannoise, était consacrée aux réflexions des professionnels sur l'avenir et les problématiques du clubbing lors d'un forum animé par Thomas Lécuyer, qui s'occupe également de la coordination générale. Le rôle des nouvelles technologies ainsi que la charte, mise en place par GastroLausanne, en collaboration avec la Ville de Lausanne et la Fondation Vaudoise contre l’Alcoolisme (FVA), figuraient parmi les sujets phares de cette rencontre. 

Numérique: entre fantasme et réalité

Suite à la pandémie, l'univers des clubs et de la fête s'est transformé tout comme le public, éprouvé par cette crise sanitaire. Alors que les nouvelles technologies envahissent l'imaginaire collectif, les intervenants de la première table ronde rappellent que le besoin de se retrouver est primordial. «Les technologies changent la donnent», explique Igor Blaska, DJ et propriétaire du MAD, «mais la silent party ne se substituera pas aux autres formes de clubbing, l'expérience n'est pas du tout similiaire.» «La night life, ça doit puer, être fort, les gens doivent se frotter…», ajoute Alexander Bücheli, directeur général de la Commission suisse Bar et Club. Pas de DJ en hologramme et de casque audio généralisés en perspective dans les clubs lausannois donc. Cependant le numérique prend de plus en plus de place dans le paiement et le ticketing. Alexandra Künzli, Account Manager chez Smeetz souligne également les avantages du cashless: «Grâce à ces nouvelles technologies, on peut analyser la consommation des clients et optimiser les stocks et les offres.»

Au terme du débat, Alexander Buechli indique également que les directeurs et directrices de clubs et discothèques sont des entrepreneurs et entrepreneuses qui doivent sans cesse veiller à la viabilité de leur business tout en assurant un rôle majeur dans le paysage culturel. Chaque année, plus de 20 millions de personnes profitent du clubbing en Suisse. Il ajoute que si une culture est bien accessible au plus grand nombre, c'est celle-ci, et que les clubs et discothèques regrettent, dans leur ensemble, de ne pas pouvoir être plus intégrés à la politique culturelle, que ce soit à l'échelle communale, cantonale ou fédérale. Une reconnaissance du monde de la nuit en tant qu'acteur culturel à part entière, avec par exemple l'éligibilité à des soutiens sous la forme de subventions pour une partie de la programmation, serait une grande avancée selon lui.

Risques réels et ressentis, un accompagnement adapté

Lors de la deuxième table ronde, un panel hétérogène d'intervenants et d'intervenantes spécialistes de la nuit lausannoise ont abordé des sujets liés à la sécurité dans les clubs et au risque ressenti par la clientèle actuelle. Après un débat sur l'importance de prendre en considération les peurs, fondées ou non, des clubbeurs et clubbeuses, notamment concernant les piqures de GHB, la charte La Belle Nuit ainsi que les actions de préventions ont occupés une grande place dans le débat. Ainsi, Riva, DJ lausannoise, a partagé son expérience personnelle et ce qui la rassurait en tant que jeune cliente de club: «La prévention, et la possibilité de se confier et de trouver des interlocuteurs de confiance était particulièrement importante pour moi. Il y avait une dame en bas des escaliers des toilettes du D! Club, par exemple, à qui on pouvait confier nos problèmes et qui me rassurait beaucoup», indique-t-elle. L'importance des pictogrammes de la charte et des actions privées des club en lien avec celle-ci a également été relevée. «Cela permet aux jeunes de savoir que les comportement inappropriés ne seront pas tolérés et qu'ils pourront compter sur le soutien du club en cas de pépin», indique Elisabeth Jaquet, du Grand Conseil de la Nuit. Durant cette journée, les débats des professionnels et professionnelles de la prévention et des directions de club reflétaient une réelle préoccupation pour le bien-être de leur clientèle et une profonde volonté d'inclusion. Ce qui a été salué par le public.

La Belle Nuit fait partie intégrante de la SBCK (Commission Suisse des Bars & Clubs) et de GastroVaud sur le volet vie nocturne. Elle joue à ce titre un rôle annuel de coordination et de défense de ses membres. «Cette troisième édition a permis aussi d'élargir les échanges avec des intervenants et intervenantes venus de Zurich et de Genève, qui prouvent la convergence des sujets abordés à travers toute la Suisse», conclut Thierry Wegmüller, Président de La Belle Nuit.